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Un anniversaire sur le lac Baïkal

C’est plus exactement sur l’île d’Olkhon que nous avons fêté cet anniversaire.

Cette île est accessible en bateau depuis le lac en été, et à pied ou en voiture en hiver lorsque que le lac est gelé. Il faut dire que l’amplitude thermique passe de -20°C à +20°C, de quoi geler et dégeler le plus grand lac au monde ! Quoi qu’il en soit, descendus du Transibérien quelques heures plus tôt à Irkoutsk, le mini bus nous dépose au bateau qui nous fait traverser le lac. Objectif : fêter l’anniversaire du frangin sur ce petit coin de planète.

     La première impression, alors que nous marchons à travers la petite ville de Khoujir (unique village de l’île), est d’évoluer dans un décor de western : les rues sont vides, volent au vent des boules de pailles, un vieux nous regarde par la fenêtre de sa maison, et nous cherchons l’auberge qui nous accueillera pour les 2 jours. Le « Nikita Bencharov’s homestead » est probablement le seul endroit pour être hébergé sur le lac Baïkal, et mon échange par email avec Natalia est source de fantasme (Natalia + russe = fantasme. Bref). C’est une petit village dans le village, une sorte de parc artistique avec des chambres et une cantine en périphérie de la ville. L’auberge n’est pas complète, et nous héritons d’un petit dortoir pour Philippe (mon frère, si tu me suis, cher lecteur) et moi. Rien d’exceptionnel mais les bâtisses en bois peintes sont pleines de charme. Demain Philippe fête son anniversaire, on a loué des VTT et, oh joie de la mondialisation, il existe une pâtisserie française  dans le complexe de Nikita. Petit tour des environs avant de  diner à la cantine, et de rencontrer une japonaise partageant son repas avec un des nombreux chats de Nikita. Nikita est d’ailleurs aussi source de fantasme. Bref.

Baikal - Russie
Les drapeaux de prières, en face du rocher du chaman

     Je passe une très mauvaise nuit, pleine de cauchemars. Les yeux ouverts, je vois des ombres et j’entends des bruits partout autour de moi. Philippe l’expliquera par la présence du rocher du Chaman à quelques centaines de mètres. Les habitants de l’île considèrent ce lieu comme hautement sacré, les tissus (rappelant les drapeaux de prières tibétains) accrochés à des mâts témoignent de leur croyance. Selon la légende, Olkhon serait le centre du monde chamanique du Nord, où s’enfuyaient les chamanes persécutés à l’époque de Gengis Khan. Il y a donc un cimetière chaman à proximité. Frisson, angoisse et suspens. On dit même qu’il est déconseillé aux femmes enceintes d’approcher le rocher, tellement le rayonnement des esprits est fort. L’explication de mon frère à mes cauchemars me convient donc.

Baikal - Russie
Rocher du Chaman sur l’île d’Olkhone

     Le lendemain, nous louons des VTT auprès d’Arthur, sorte d’ermite exilé sur le lac Baïkal, qui habite une cabane au style high tech / retraite bouddhiste. Les vélos sont tops et nous remontons l’île à travers la forêt, sur un terrain sablonneux à souhait. Avantage : aucun danger en cas de chute. Inconvénient : on pédale dans la choucroute. On arrive tant bien que mal sur un petit point de vue, et nous descendons vers le lac. Philippe, voyageur téméraire et intrépide, ose le trempage de pieds dans le lac. Il n’ira pas plus loin.

Nous profitons du soleil pour glander simplement et profiter du temps qui passe, avec le paysage en seule distraction.

Baikal - Russie
Trempage d’orteil téméraire
Baikal - Russie
Extrait du carnet de voyage

     Le retour se fait plus rapidement. On est plus à l’aise sur les VTT, on prend de la vitesse, on n’a plus peur du chemin sablonneux, on prend confiance (ce qui a valu une chute mémorable à Philippe, filmée qui plus est, mais par souci d’intégrité, nous ne publierons pas cette vidéo. Même pas en gif. Non, n’insistez pas). De retour au village, le « Diskobar » ne peut qu’attirer notre attention. Cette sorte de saloon est le seul débit de boisson alcoolisée, donc notre point de chute post VTT. Pas un chat dehors, pas un chat dedans. On se demande même si on n’est pas chez des gens qui ont récupéré l’enseigne d’un ancien bar. Sort une femme de sa cuisine, qui attend (probablement) notre commande.  On se lance :

  • « Pivo ? »
  • « … »
  • « Beer ? Pivo ? »
  • « … »

On montre dans le frigo transparent des bouteilles qui nous semblent être de la bière.

  • « све́тлое пи́во ? »
  • « Yes yes ! Beer… Pivo quoi… Da, da. »

Je vous passe l’épisode pour commander les cacahuètes. En tout cas on savoure cette boisson universelle en terrasse, en grignotant des арахис. Une fois revigorés, on se rend au « Bistro français » de l’auberge qui est en fait la pâtisserie française (c’est un peu comme le franponais : si le nom est français, ça sonne bien, même si ça ne correspond pas vraiment à la réalité). Bref, c’est l’heure du gâteau d’anniversaire. Il y a du choix, l’ambiance est cosy, il y a un vieux qui boulotte sa part à l’intérieur, la pâtissière est conforme au fantasme standard, bref, on achète deux parts de gâteau, en précisant que le frangin fête son anniversaire et qu’ « on est français Madaaaaame… ». La pâtissière se marre, le vieux souhaite à Philippe un « bon anniversaire Moooonsieur ». Ce n’est que plus tard que l’on apprendra que le vieux n’est autre que Nikita, fondateur de l’endroit où l’on habite. Merde, c’était pas une femme, mais un homme. Et un vieux. C’est un peu comme Hitchcock qui fait de la figu dans ses films, l’air de rien. Bref, ça nous a fait la journée.

Baikal - Russie
Bistro français, môssieur !
Baikal - Russie
« French cakes », comme on dit là bas !

     Mais c’était sans compter le retour des vélos. Arthur, l’ermite bouddhiste adepte de la domotique, nous invite à passer la soirée chez lui. C’est une cabane. Enfant, j’aurais adoré avoir une cabane comme ça. Ado, ça aurait été un aspirateur à nana. Mais là, c’est juste rigolo. En tout cas c’est bas de plafond, le home cinema (video projecteur, enceinte 4×1000 Watts, canapé-coussins-couvertures de toute beauté pour 10 personnes) est en attente de son public, et Arthur est prêt à appuyer sur le bouton play. Je ne sais pas pourquoi mais la série de diapo du lac Baïkal en été, en automne, en hiver, au printemps, en été, en automne, en hiver……… a un effet soporifique total. Bref, je cligne lentement des yeux pendant que Philippe fait connaissance. Finalement, c’est le concert enragé de guimbarde d’Arthur qui aura raison de mon sommeil profond, et me poussera à aller dormir en prenant congé. Mais ce solo de guimbarde, je regrette de ne pas l’avoir immortalisé. Parce que entre nous, la guimbarde, c’est un peu l’instrument du mec qui ne sait jouer de rien non ? Faut juste pas se casser une dent avec le mini marteau, sinon ca fait boiiiiiing, c’est sympa, et tu modules les sons avec la bouche. Là, j’ai du revoir ma copie. Le type est spécialiste. Il sait faire les triples croches, et arrive à faire du headbanging en jouant. Gros gros souvenir avant d’aller dormir avec les ondes des chamans.

le Lac Baikal en Russie
Aquarelle d’Arthur, par Philippe

     Une nuit nettement plus tranquille cette fois-ci, et tant mieux car le lendemain nous repartons à Irkoutsk pour terminer notre périple de 5 000km en train, de Hong Kong à Moscou. Le transibérien n’attend pas, mais ça, c’est une autre histoire…

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3 Commentaires

  1. Bien evidemment mon article favori! Pour tous ces fantastiques souvenirs! Le plus bel anniversaire au bout du monde, et en famille. 🙂

  2. Snooze Again Snooze Again

    Il faut que je monte la vidéo maintenant (enfin la vidéo tout public) 😉

  3. Ohhhh, on l’attend avec impatience!

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